Pedro Álvares Cabral
Naissance | |
---|---|
Décès | |
Sépulture |
Igreja da Graça (Santarém) (en) |
Nom de naissance |
Pedro Álvares de Gouveia |
Activités |
Explorateur, navigateur |
Père |
Fernão Cabral (d) |
Mère |
Isabel de Gouveia de Queirós (d) |
Conjoint |
Isabel de Castro (d) |
Enfants |
Membre de |
His Most Faithful Majesty's Council (en) () |
---|---|
Distinction |
Chevalier de l'ordre militaire du Christ (d) () |
Pedro Álvares Cabral, né vers 1467 à Belmonte et mort vers 1520 à Santarém, est un navigateur portugais de l'époque des grandes découvertes, considéré comme le découvreur du Brésil, à l'occasion du voyage de la deuxième flotte portugaise envoyée vers les Indes en 1500, à la suite du voyage de Vasco de Gama en 1498.
Chargé par le roi du Portugal Manuel Ier d'aller aux Indes (l'Asie orientale) afin de prolonger l'œuvre de Vasco de Gama, il accoste par hasard sur la côte de l'Amérique du Sud le et prend possession de ce territoire, dont il estime qu'il se trouve dans la région du monde attribuée au Portugal par le traité de Tordesillas (1494).
Sa carrière et sa vie sont mal connues en dehors de ce voyage. Pedro Cabral était certainement un officier, mais sans doute pas un marin. Les raisons réelles de sa nomination comme amiral de cette flotte ne sont pas connues.
Pedro Cabral avant le voyage de 1500
[modifier | modifier le code]Origines
[modifier | modifier le code]On sait peu de choses sur la vie de Pedro Álvares Cabral avant le voyage qui aboutit à la découverte du Brésil. Il est né en 1467 ou 1468, cette dernière date étant la plus souvent citée[1],[2], à Belmonte, dans la province de Beira Baixa, située à environ 100 km au nord-est de Lisbonne et 70 à l'est de Coimbra[3],[1],[4],[5].
Il est le fils de Fernão Álvares Cabral et d'Isabel Gouveia, un de leurs onze enfants (cinq garçons et six filles[1],[4],[6]).
Il est baptisé sous le nom de Pedro Álvares de Gouveia et ce n'est que plus tard, sans doute à la mort de son frère aîné en 1503[4],[7],[8], qu'il commence à utiliser le nom de son père[6],[9].
La famille Cabral
[modifier | modifier le code]La famille a un blason : deux chèvres violettes sur champ d'argent. Le violet (pourpre) représente la fidélité, et les chèvres évoquent le nom de la famille (cabral = « chèvre »)[1]. Bien entendu, seul son frère aîné était habilité à user du nom de la famille[pas clair][10].
Les traditions familiales de l'époque affirment que les Cabrais (pluriel de Cabral) sont les descendants de Karanus, premier roi légendaire de la Macédoine, descendant à la septième génération d'Héraclès[D].
Mettant les mythes de côté, l'historien James McClymont pense qu'une autre légende familiale donne des indications intéressantes sur l'origene des Cabral. D'après cette histoire, les Cabraes[pas clair] sont issus su clan castillan des Cabreiras, qui avait le même blason[E].
La famille Cabral apparaît au premier plan au cours du XIVe siècle avec Álvaro Gil Cabral, arrière-arrière-grand-père de Pedro, commandant sur la « frontière » (la zone de contact avec les territoires musulmans pendant la Reconquista). Il fait partie des nobles ralliés à Jean d'Aviz et opposés au roi de Castille pendant la crise de succession de 1383-1385. En récompense, Jean d'Aviz devenu roi attribue à Álvaro Gil le fief héréditaire de Belmonte[3],[1],[11]…
Formation et personnalité
[modifier | modifier le code]Éduqué selon les usages de la petite noblesse[12],[13], Cabral est envoyé en 1479 à la cour du roi Alphonse V (1432-1481), vers l'âge de 12 ans. Il a sans doute 17 ou 18 ans lorsqu'en juin 1484, il est nommé moço fidalgo (« noble page », un titre mineur habituellement décerné aux jeunes nobles) par le roi Jean II[4] (1455-1495).
On ne dispose d'aucun portrait de lui à cette époque. Il est connu pour avoir une forte constitution[14] et pour être aussi grand que son père, 1,90 m[15],[16],[17].
Son caractère a été décrit comme bien élevé, courtois[17], prudent[5], généreux, tolérant avec ses ennemis[9], humble[14], mais aussi orgueilleux[17] et trop attaché au respect qu'il pensait que son honneur et sa position commandaient[18].
Début de carrière
[modifier | modifier le code]Les traces de ses emplois avant 1500 sont très fragmentaires. Cabral a pu aller combattre en Afrique du Nord, comme ses ancêtres[pas clair] et beaucoup de jeunes nobles de son temps[3],[6],[19].
Le roi Manuel Ier (1469-1521), qui accède au trône en 1495, lui accorde une rente annuelle de 30 000 reais ([20],[21]). Il reçoit en même temps le titre de fidalgo (« noble ») en conseil du roi et est nommé chevalier de l'ordre du Christ[21].
La découverte du Brésil (1500)
[modifier | modifier le code]Contexte : les grandes découvertes du XVe siècle et le traité de Tordesillas (1494)
[modifier | modifier le code]Les Portugais, qui explorent (et exploitent) les côtes d'Afrique depuis les années 1410, d'abord sous la direction de l'infant Henri le Navigateur (1394-1460), découvrent le cap de Bonne-Espérance en 1488 (Bartolomeu Dias).
En 1492, Christophe Colomb, parti au nom des Rois catholiques d'Espagne (Isabelle de Castille et Ferdinand d'Aragon), avec le même objectif, mais à travers l'océan Atlantique, découvre quelques îles des Caraïbes (Hispaniola, Cuba), qu'il identifie à tort comme des territoires inconnus des « Indes ».
La découverte de Colomb pose un problème : à qui appartiennent ces îles ? En vertu du traité d’Alcáçovas (1479), elles devraient revenir au Portugal, puisqu'elles se trouvent au sud de la latitude des îles Canaries, possession de la Castille. Mais le traité d’Alcáçovas n'envisageait pas des terres aussi éloignées en longitude de l'Europe.
Il s'ensuit une négociation et, en 1494, les Rois catholiques et le Portugal signent sous l'égide du pape le traité de Tordesillas, qui établit une nouvelle ligne de partage, en longitude cette fois : un méridien situé à 370 lieues des îles portugaises du Cap-Vert. Les Espagnols sont libres d'agir à l'ouest de ce méridien ; les Portugais à l'est.
En 1498, une avancée majeure a lieu à l'avantage du Portugal : Vasco de Gama conduit la première escadre européenne à Calicut : il est arrivé aux « Indes », la source des épices dont les classes dirigeantes d'Europe sont de gros consommateurs. Vasco de Gama rentre au Portugal en 1499.
Dès 1500, le roi de Portugal organise un deuxième convoi vers les Indes et place à sa tête Pedro Cabral.
La nomination de Cabral comme commandant de la flotte vers les Indes (1500)
[modifier | modifier le code]Cabral est nommé commandant en chef (capitão-mor, littéralement « capitaine majeur ») de cette flotte[9],[22],[23] Le .
La Couronne portugaise nommait traditionnellement des nobles aux commandements militaires et maritimes, sans égard pour leur compétence ou leur expérience professionnelles[24]. C'était le cas pour les capitaines des navires placés sous le commandement de Cabral[25]. Cette pratique avait d'évidents inconvénients, car l'autorité pouvait aussi bien être conférée à des personnes hautement incompétentes et mal préparées que conférée à des chefs remarquables tels que Afonso de Albuquerque ou dom João de Castro[26].
Peu de détails nous sont parvenus sur les critères utilisés pour attribuer cette place à Pedro Cabral. Dans le décret royal de nomination, la seule raison donnée est : « ses mérites et ses services ». Rien de plus sur ses qualifications ne nous est connu[27]. L'historien William Greenlee pense que le roi Manuel Ier, qui a le même âge que Pedro Cabral, « l'avait certainement bien connu à la Cour ». Cela, ainsi que « la situation de la famille Cabral, sa loyauté inconditionnelle à la Couronne, l'apparence personnelle de Cabral et l'habileté dont il a fait preuve à la cour et au conseil furent des facteurs importants »[28]. A sans doute aussi joué en sa faveur l'influence de deux de ses frères qui siégeaient au conseil du roi[28]. Étant donné les intrigues politiques permanentes à la cour, Cabral a pu aussi appartenir à une faction qui favorisa sa nomination[28]. L'historien Malyn Newitt a soutenu l'hypothèse d'un choix résultant « d'une tentative délibérée d'équilibrer les intérêts de factions rivales de familles nobles, qui n'avaient pas de raison de le recommander et parce qu'il n'avait pas d'expérience connue de commandement d'expédition majeure. »[29];
Cabral reçoit 10 000 cruzados (pièce de monnaie d'or presque pur (989/1000), apparue en 1457 et pesant alors 3,5 g[30]) et le droit d'acheter 30 tonnes de poivre pour son propre compte et de les rapporter en Europe, pouvant alors les revendre, hors-taxes, à la couronne portugaise[31]. Il est aussi autorisé à importer 10 ballots de n'importe quels autres épices, en franchise de droits[31]. Malgré les risques du voyage, Cabral avait la perspective de devenir un homme riche s'il réussissait à rentrer au Portugal avec sa cargaison. Les épices étaient alors très recherchées en Europe[31].
Composition de la flotte et de l'état-major
[modifier | modifier le code]Cabral devint le commandant, cependant des navigateurs plus expérimentés lui sont adjoints pour l'aider sur les questions navales[32]. Les plus fameux étaient Bartolomeu Dias, Diogo Dias et Nicolau Coelho[29],[33],[34]. Ils devaient, avec les autres capitaines, commander treize navires[6],[29],[35] et 1 500 hommes[6],[36],[37],[38]. Sur ce contingent, 700 étaient des soldats, mais la plupart étaient de simples roturiers sans formation ni expérience au combat[39].
La flotte avait deux divisions. La première était composée de neuf naus (caraques) et deux rondes caravelles, et mirent le cap sur Calicut dans le but de mettre en place des relations commerciales et une factorerie. La deuxième division, consistant en une nau et une caravelle, mit les voiles avec comme destination le port de la province de Sofala au Mozambique[40].
Début du voyage : de Lisbonne à l'Équateur
[modifier | modifier le code]La flotte sous le commandement de Cabral part de Lisbonne le à midi.
Le 8 ont eu lieu les adieux publics avec une messe et des célébrations suivies par le roi, la Cour et une foule nombreuse[37],[41],[42],[43],[44],[45].
Au matin du 14 mars, l'escadre contourna la Grande Canarie, la plus importante des îles Canaries[43],[46].
Elle cingla vers Cap-Vert, qu'elle atteint le 22 mars[43],[47]. Le lendemain, une nau commandée par Vasco de Ataíde avec 150 hommes disparut sans laisser de traces[41],[43],[47].
La flotte franchit l'Équateur le 9 avril et met le cap à l'ouest aussi loin du continent africain qu'il semble possible selon la technique de navigation dite de la volta do mar (littéralement le « tour de la mer »)[41],[48].
Arrivée en territoire inconnu
[modifier | modifier le code]Des algues sont aperçues le 21 avril, ce qui laisse penser aux marins qu'ils approchent d'une côte. Cela se confirma le lendemain après-midi, mercredi , quand la flotte mouilla près de ce que Cabral baptisa le monte Pascoal (« mont de Pâques », car c'était la semaine de Pâques). Cet emplacement est situé au nord-est de ce qui est aujourd'hui le Brésil[43],[48],[49],[50].
Contacts avec les indigènes
[modifier | modifier le code]Les Portugais détectèrent la présence d'habitants sur le rivage et tous les capitaines se rassemblèrent sur le navire amiral de Cabral le 23 avril[51]. Cabral ordonna à Nicolau Coelho, un capitaine qui avait l'expérience des voyages en Inde avec Vasco de Gama, de débarquer et de nouer des contacts. Il mit pied à terre et échangea des cadeaux avec les indigènes[52]. Après que Coelho fut revenu, Cabral emmena la flotte vers le nord, où après 65 km de navigation, il mouilla le 24 avril dans ce que le commandant en chef nomma Porto Seguro (« port sûr »)[53]. La place était un port naturel et Afonso Lopes (pilote du navire amiral) embarqua deux indigènes à bord pour rencontrer Cabral[54].
Comme la fois précédente, la rencontre fut amicale et Cabral leur offrit des cadeaux[55]. Les habitants étaient des chasseurs cueilleurs, que les Européens appelèrent du nom générique d'« Indiens ». Les hommes cherchaient la nourriture en traquant le gibier, pêchant et cueillant des végétaux, alors que les femmes cultivaient des lopins de terre. Ils étaient divisés en innombrables tribus rivales. Les tribus que Cabral rencontra étaient des Tupiniquim[56]. Certains de ces groupes étaient nomades et d'autres sédentaires — connaissant le feu mais pas la métallurgie. Quelques tribus de ces régions pratiquaient le cannibalisme[57]. Le 26 avril, comme de plus en plus d'indigènes curieux apparaissaient, Cabral ordonna à ses hommes de construire un autel où une messe serait célébrée[58].
Les jours suivants furent utilisés pour faire les réserves d'eau, de nourriture, de bois et d'autres provisions. Les Portugais édifièrent aussi une croix de bois – peut-être haute de sept mètres.
Calcul de la longitude
[modifier | modifier le code]Cabral détermina que ces nouvelles terres étaient bien à l'est de la ligne de démarcation entre le Portugal et l'Espagne qui avait été définie par le traité de Tordesillas. Le territoire était bien dans la partie du monde allouée au Portugal.
Pour solenniser la revendication du Portugal sur cette contrée, la croix fut érigée et un second service religieux organisé le 1er mai[53],[59]. Cabral nomma cette terre découverte Ilha de Vera Cruz (en)[60]. Le lendemain, un navire de ravitaillement sous le commandement de Gaspar de Lemos[61],[62] ou d'André Gonçalves[63] (les sources divergent)[64] retourna au Portugal pour apprendre la nouvelle de la découverte au roi Manuel Ier et lui apporter la fameuse lettre de Pero Vaz de Caminha, le secrétaire de Cabral.
La suite du voyage (1500-1501)
[modifier | modifier le code]Tragédie au large de l'Afrique
[modifier | modifier le code]La flotte reprit la mer soit le 2[65] soit le 3[63] et navigua le long des côtes est de l'Amérique du Sud. Cabral fut convaincu qu'il avait découvert un continent entier, plutôt qu'une île[66]. Autour du 5 mai, la flotte vira de bord vers l'Afrique[66]. Le 23[66] ou 24[62] mai, ils traversèrent une tempête dans la zone de haute pression de l'Atlantique Sud, provoquant la perte de quatre bateaux. L'emplacement exact du désastre n'est pas connu – les conjectures vont du cap de Bonne-Espérance à la pointe sud du continent africain[66] à en vue de la côte sud-américaine[67]. Trois naus et une caravelle commandée par Bartolomeu Dias – le premier Européen à atteindre la cap de Bonne-Espérance en 1488 – disparurent, et 380 hommes furent perdus[68].
Les vaisseaux restants, mis à mal par les conditions climatiques très difficiles et leur gréements endommagés furent séparés. Un navire commandé par Diogo Dias, erra isolé[69], les six autres ayant pu se regrouper. Ils se rassemblèrent en deux formations consistant en trois navires chacune, puis naviguèrent vers l'est, doublant le cap. Suivant la côte, ils remontèrent vers le nord et accostèrent quelque part dans l'archipel des Primeiras et Segundas, sur les côtes du Mozambique et au nord de la province de Sofala[69],[70]. La flotte resta dix jours pour des réparations[69],[71]. Puis, l'expédition repartit vers le nord, et le 26 mai atteint Quiloa (Kilwa Kisiwani), où Cabral s'efforça en vain de négocier un traité[72].
De Kilwa Kisiwani, la flotte partit pour Malindi, qu'elle rejoignit le 2 août. Cabral rencontra le roi, avec qui il noua des relations amicales et échangea des présents. Des pilotes furent recrutés à Malindi pour la dernière partie du voyage vers l'Inde. La terre fut atteinte à Anjadip, une île fréquentée par les navires en quête de ravitaillement sur leur route vers Calicut. Les bateaux furent mis au sec, calfatés et repeints. Des arrangements furent mis en place en vue de la rencontre avec le dirigeant de Calicut[73],[74],[75].
Arrivée à Calicut
[modifier | modifier le code]La flotte arriva à Calicut le 13 septembre[65],[73],[75]. Cabral réussit à négocier avec le Zamorin (titre en portugais du raja de Calicut) et obtint la permission d'établir un comptoir et un entrepôt[74]. Dans l'espoir d'une amélioration continue des relations, Cabral répartit ses hommes dans plusieurs missions militaires à la demande du Zamorin[F].
Cependant, le 16[76] ou 17[77] décembre, le comptoir fut attaqué par surprise par des centaines[76] (ou d'après d'autres récits, des milliers)[74] d'Arabes musulmans et d'hindous. En dépit de la défense désespérée des arbalétriers, plus de 50 Portugais furent tués[G][76],[78]. Les derniers survivants se replièrent sur les navires. Pensant que l'attaque résultait de la jalousie de marchands arabes, Cabral attendit 24 heures une explication du dirigeant de Calicut, mais aucune excuse ne lui parvint[77],[78],[79].
Le massacre de décembre 1500
[modifier | modifier le code]Les Portugais rendus furieux par l'attaque du comptoir et la mort de leurs camarades saisirent dix navires marchands arabes à l'ancre dans le port. Environ 600 des membres d'équipage[78] furent tués et leur cargaison confisquée puis les marchands furent brûlés vifs[77],[79]. Cabral ordonna à ses navires de bombarder Calicut pendant une journée entière en représailles de la violation des accords[77],[79].
Le massacre fut mis sur le compte de l'animosité envers les musulmans, que les Portugais avaient développée pendant des siècles de lutte contre les Maures dans la péninsule Ibérique et en Afrique du Nord[80]. Plus encore, les Portugais étaient déterminés à dominer le négoce des épices et n'avaient pas l'intention de permettre à la compétition de se renforcer. Les Arabes, à l'inverse, n'avaient aucun désir de permettre aux Portugais de briser leur monopole de l'accès aux épices. Les Portugais avaient commencé par demander à recevoir un traitement préférentiel dans chaque aspect de ce commerce. La lettre du roi Manuel Ier apporté par Cabral au roi de Calicut, qui fut traduite par les interprètes arabes du dirigeant, demandait l'exclusion des commerçants arabes. Les marchands musulmans crurent qu'ils allaient perdre leur possibilité de négoce et leur fortune[81], et tentèrent de soulever le roi hindou contre les Portugais[82].
L'historien William Greenlee expliqua que les Portugais avaient compris qu'« ils étaient moins nombreux et que ceux qui viendraient en Inde sur les flottes futures auraient toujours un désavantage numérique ; et donc que la traîtrise devait être punie de telle façon qu'ils seraient craints et respectés. C'était leur artillerie supérieure qui leur permettrait d'atteindre ce but. » De ce fait, ils créèrent un précédent pour la diplomatie de la canonnière pratiquée dans les siècles suivants[83].
Retour au Portugal
[modifier | modifier le code]Des indications dans les relations de voyages de Vasco da Gama avaient décidé le roi Manuel Ier à informer Cabral de l'existence d'un autre port au sud de Calicut où il pourrait aussi commercer. Cette ville était Cochin (Kochi) que la flotte atteint le 24 décembre[84]. Cochin était formellement vassale de Calicut, et aussi sous la domination d'autres cités indiennes. Cochin souhaitait obtenir son indépendance, et les Portugais étaient prêts à exploiter les mésententes indiennes – comme les Britanniques le feront trois siècles plus tard. Cette tactique finalement permit d'établir l'hégémonie des Portugais sur la région[84]. Cabral négocia une alliance avec les dirigeants de Kochi, comme avec les dirigeants d'autres villes, et fut en mesure d'établir un autre comptoir. Enfin, chargée de précieuses épices, la flotte mit le cap sur Kannur pour des derniers achats avant d'entreprendre le retour vers le Portugal le [76],[77],[84].
L'expédition se dirigea vers la côte orientale de l'Afrique. Un des navires se drossa sur un banc de sable et le vaisseau commença à couler. Comme il n'y avait pas de place disponible sur les autres vaisseaux, la cargaison fut perdue et Cabral ordonna que la caraque soit incendiée[85],[86],[87]. La flotte s'en vint ensuite sur l'île de Mozambique (nord-est de Sofala), pour faire des provisions et préparer les bateaux pour le difficile passage du cap de Bonne-Espérance[88]. Une caravelle fut envoyée vers Sofala — un des buts de l'expédition. Une seconde caravelle, considérée comme la plus rapide de la flotte et commandée par Nicolau Coelho, fut expédiée en avant pour informer le roi du succès du voyage. Un troisième vaisseau, commandé par Pedro de Ataíde (en), resta séparé du reste de la flotte après avoir quitté le Mozambique[88].
Le 22 mai, la flotte réduite à seulement deux navires doubla le cap de Bonne-Espérance[89]. Elle toucha Beseguiche (aujourd'hui Dakar, situé près du Cap-Vert) le 2 juin. Ils y retrouvèrent non seulement la caravelle de Nicolau Coelho mais aussi la nau commandée par Diogo Dias — qui avait été perdue de vue depuis près d'un an à la suite du désastre dans l'Atlantique Sud. La nau avait vécu de nombreuses aventures[H] et était maintenant en mauvais état avec seulement sept hommes en mauvaise condition[86] . Une autre flotte portugaise était aussi à l'ancre à Beseguiche. Lorsque Manuel Ier fut informé de la découverte du Brésil, il envoya une autre flotte plus réduite pour l'explorer. L'un de ses navigateurs était Amerigo Vespucci (qui donna son nom à l'Amérique, qui prévint Cabral de son exploration, confirmant qu'il avait mis le pied sur un nouveau continent et pas simplement sur une île[90].
La caravelle de Nicolau Coelho partit en premier de Beseguiche et arriva au Portugal le [91]. Cabral resta derrière, attendant le vaisseau manquant de Pedro de Ataíde et celui envoyé à Sofala. Les deux arrivèrent finalement et Cabral arriva au Portugal le [92]. Au total, deux navires rentrèrent vides, cinq étaient pleins et six perdus.
Les marchandises transportées rapportèrent 800 % de profit à la Couronne portugaise[93]. Une fois la cargaison vendue, les capitaux reçus firent plus que couvrir les coûts d'équipement de la flotte, le coût des vaisseaux qui avaient été perdus[94].
Carrière ultérieure de Pedro Cabral
[modifier | modifier le code]Anciennement à Santarém, une partie de ses ossements se trouve aujourd'hui dans la chapelle de l'église romane aux côtés de ses parents et de ses grands-parents.
Postérité
[modifier | modifier le code]« Non impressionné par les pertes incroyables qu'il avait subies précédemment », dit l'historien James Mc Clymont, quand Cabral « au large des côtes africaines, poussa ses hommes à aller de l'avant pour accomplir la tâche qui lui avait été assignée et fut capable d'inspirer aux officiers survivants un grand courage »[89]. « Peu de voyages vers le Brésil et l'Inde furent si bien exécutés que ceux de Cabral », affirma l'historien Bailey Diffie[50], qui ouvrit la route qui conduirait à l'établissement d'un empire colonial portugais allant de l'Afrique à l'Extrême-Orient, et finalement à l'empire du Brésil[65].
Hommages
[modifier | modifier le code]En 1994, il est représenté avec sa caravelle sur les billets de banque portugais de 1 000 escudos (environ 5 euros).
Notes et références
[modifier | modifier le code]- Greenlee (1995), p. xxxix.
- McClymont (1914), p. 13.
- Bueno (1998), p. 35.
- Abramo (1969), p. 34.
- Calmon (1981), p. 42.
- Espínola (2001), p. 232.
- Vieira (2000), p. 28.
- Vainfas (2001), p. 475.
- Fernandes (1969), p. 53.
- McClymont (1914), p. 2.
- McClymont (1914), p. 3.
- Subrahmanyam (1997), p. 177.
- Newitt (2005), p. 64.
- Peres (1949), p. 114.
- Bueno (1998), p. 36.
- Bueno (1998), p. 126.
- Espínola (2001), p. 231.
- Fernandes (1969), p. 52.
- Peres (1949), p. 94.
- McClymont (1914), p. 33.
- Greenlee (1995), p. xl.
- Diffie (1977), p. 187.
- Peres (1949), p. 92.
- Boxer (2002), p. 128.
- Bueno (1998), p. 18.
- Boxer (2002), p. 312.
- Bueno (1998), p. 34.
- Greenlee (1995), p. xli.
- Newitt (2005), p. 65.
- « Cruzado - Manuel I » sur le site Numista.
- Bueno (1998), p. 26.
- Bueno (1998), p. 37.
- Greenlee (1995), p. xlii.
- Diffie (1977), p. 188.
- Pereira (1979), pp. 63–64.
- Pereira (1979), p. 60.
- McClymont (1914), p. 18.
- Subrahmanyam (1997), p. 175.
- Bueno (1998), p. 38.
- Bueno (1998), p. 22.
- Diffie (1977), p. 189.
- Bueno (1998), pp. 14–17, 32–33.
- Vianna (1994), p. 43.
- Pereira (1979), p. 64.
- Varnhagen, p. 72.
- Bueno (1998), p. 42.
- Bueno (1998), p. 43.
- Bueno (1998), p. 45.
- Varnhagen, p. 73.
- Diffie (1977), p. 190.
- Bueno (1998), p. 89.
- Bueno (1998), p. 90.
- Vianna (1994), p. 44.
- Bueno (1998), p. 95.
- Bueno (1998), p. 97.
- Boxer (2002), pp. 98–100.
- Boxer (2002), p. 98.
- Bueno (1998), p. 100.
- Bueno (1998), pp. 106–108.
- Bueno (1998), p. 109.
- Bueno (1998), p. 110.
- Greenlee (1995), p. xx.
- McClymont (1914), p. 21.
- Diffie (1977), p. 193.
- Diffie (1977), p. 194.
- Bueno (1998), p. 116.
- McClymont (1914), p. 23.
- Bueno (1998), p. 117.
- Greenlee (1995), p. xxi.
- McClymont (1914), p. 25.
- McClymont (1914), pp. 26–27.
- Greenlee (1995), pp. xxi–xxii.
- Greenlee (1995), p. xxii.
- McClymont (1914), p. 27.
- Bueno (1998), p. 118.
- Bueno (1998), p. 119.
- McClymont (1914), p. 28.
- Kurup (1997), p. 10.
- Greenlee (1995), p. xxiii.
- Greenlee (1995), p. xxiv.
- Greenlee (1995), p. xxv.
- Greenlee (1995), pp. xxvi, xxxiii.
- Greenlee (1995), pp. xxiv, xxxiii.
- Greenlee (1995), p. xxvii.
- Greenlee (1995), p. xxviii.
- Bueno (1998), p. 120.
- McClymont (1914), p. 29.
- Greenlee (1995), p. xxix.
- McClymont (1914), p. 35.
- Bueno (1998), p. 121.
- Bueno (1998), p. 122.
- Greenlee (1995), p. xxx.
- Espínola (2001), p. 234.
- McClymont (1914), pp. 31–32.
Voir aussi
[modifier | modifier le code]Bibliographie
[modifier | modifier le code]- Abramo, Alcione. Grandes Personagens da Nossa História (v.1). São Paulo: Abril Cultural, 1969. (pt)
- Alves Filho, João. Nordeste: estratégias para o sucesso : propostas para o desenvolvimento do Nordeste brasileiro, baseadas em experiências nacionais e internacionais de sucesso. Rio de Janeiro: Mauad Consultoria e Planejamento Editorial, 1997. (ISBN 978-85-85756-48-2) (pt)
- Barata, Mário. O descobrimento de Cabral e a formação inicial do Brasil. Coimbra: Biblioteca Geral da Universidade de Coimbra, 1991. (pt)
- Berrini, Beatriz. Eça de Queiroz: a ilustre casa de Ramires : cem anos. São Paulo: EDUC, 2000. (ISBN 978-85-283-0198-4) (pt)
- Boxer, Charles R. O império marítimo português 1415–1825. São Paulo: Companhia das Letras, 2002. (ISBN 8535902929) (pt)
- Bueno, Eduardo. A viagem do descobrimento: a verdadeira história da expedição de Cabral. Rio de Janeiro: Objetiva, 1998. (ISBN 978-85-7302-202-5) (pt)
- Calmon, Pedro. História de D. Pedro II. 5 v. Rio de Janeiro: José Olympio, 1975. (pt)
- Calmon, Pedro. História do Brasil. 4e éd. Rio de Janeiro: José Olympio, 1981. (pt)
- Capistrano de Abreu, João; José Honório Rodrigues. Capítulos de História Colonial, 1500–1800, v. 1. 6e éd. Rio de Janeiro: Civilização Brasileira. 1976. (pt)
- Diffie, Bailey Wallys; Boyd C. Shafer; George Davison Winius. Foundations of the Portuguese empire, 1415–1580 (v.1). Minneapolis: University of Minneapolis Press, 1977. (ISBN 978-0-8166-0782-2) (en)
- Greenlee, William Brooks. The voyage of Pedro Álvares Cabral to Brazil and India: from contemporary documents and narratives. New Delhi: J. Jetley, 1995. (en)
- Espínola, Rodolfo. Vicente Pinzón e a descoberta do Brasil. Rio de Janeiro: Topbooks, 2001. (ISBN 978-85-7475-029-3) (pt)
- Fernandes, Astrogildo. Pedro Álvares Cabral: 500 anos. Porto Alegre: Universidade Federal do Rio Grande do Sul, 1969. (pt)
- Kurup, K. K. N. India's naval traditions: the role of Kunhali Marakkars. New Delhi: Northern Book Centre, 1997. (ISBN 978-81-7211-083-3) (en)
- McClymont, James Roxbury. Pedraluarez Cabral (Pedro Alluarez de Gouvea): his progenitors, his life and his voyage to America and India. Londres, Strangeways & Sons, 1914. (en)
- Newitt, M. D. D. A History of Portuguese Overseas Expansion 1400–1668. New York: Routledge, 2005. (ISBN 978-0-415-23980-6) (en)
- Pereira, Moacir Soares. Capitães, naus e caravelas da armada de Cabral. Coimbra: Universidade de Coimbra, 1979. (pt)
- Peres, Damião. O descobrimento do Brasil: antecedentes e intencionalidade. Porto: Portucalense, 1949. (pt)
- Presser, Margareth. Pequena enciclopédia para descobrir o Brasil. Rio de Janeiro: Senac, 2006. (ISBN 978-85-87864-74-1) (pt)
- Ramos, Fábio Pestana. Por mares nunca dantes navegados: a aventura dos Descobrimentos. São Paulo: Contexto, 2008. (ISBN 978-85-7244-412-5) (pt)
- Revista Trimestral de História e Geografia (v.2). Issue 5. Rio de Janeiro: Typographia de J. E. S. Cabral, 1840. (pt)
- Schwarcz, Lilia Moritz. As barbas do Imperador: D. Pedro II, um monarca nos trópicos. 2e éd. São Paulo: Companhia das Letras, 1998. (ISBN 978-85-7164-837-1) (pt)
- Smith, Anthony. Explorers of the Amazon. Chicago: University of Chicago Press, 1990. (ISBN 978-0-226-76337-8) (en)
- Skidmore, Thomas E. Uma História do Brasil. 4e éd. São Paulo: Paz e Terra, 2003. (ISBN 978-85-219-0313-0) (pt)
- Subrahmanyam, Sanjay. The Career and Legend of Vasco da Gama. New York: Cambridge University Press, 1997. (ISBN 978-0-521-64629-1) (en)
- Tomlinson, Regina Johnson. The Struggle for Brazil: Portugal and "the French Interlopers" (1500–1550). New York: Las Americas Pub. Co. 1970. (en)
- Vainfas, Ronaldo. Dicionário do Brasil colonial (1500–1808). Rio de Janeiro: Objetiva, 2001. (ISBN 978-85-7302-320-6) (pt)
- Varnhagen, Francisco Adolfo de. História Geral do Brasil (v.1). 3e éd. São Paulo: Melhoramentos, N/A (pt)
- Vianna, Hélio. História do Brasil: período colonial, monarquia e república. 15e éd. São Paulo: Melhoramentos, 1994. (pt)
- Vieira, Cláudio. A história do Brasil são outros 500. Rio de Janeiro: Record, 2000. (ISBN 978-85-01-05753-2) (pt)
Articles connexes
[modifier | modifier le code]Liens externes
[modifier | modifier le code]- Ressource relative aux beaux-arts :
- Notices dans des dictionnaires ou encyclopédies généralistes :