« Loi du plus fort » : différence entre les versions

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{{voir homonymes|La Loi du plus fort}}
[[File:PL Jean de La Fontaine Bajki 1876 page107.png|thumb|210pxredresse|"« La raison du plus fort est toujours la meilleure" », morale de la fable de [[Jean de La Fontaine|La Fontaine]] ''[[Le Loup et l'Agneau]]'' de [[Jean de La Fontaine]] (1668).]]
 
LaLe droit '''loi du plus fort''' désigne une situation où une [[Conflit (science sociale)|confrontation]] se résoudrésout par un [[rapport de force]] au ''profit'' d'une partie (individu ou groupe) et au ''détriment'' d'une autre.
 
Cette situation s'oppose au [[Conciliation|règlement à l'amiable]], ou "« par [[consensus"]] », à l'issue duquel aucune des parties n'est censée se sentir lésée.
 
== Évolution des analyses ==
L'observation de ces rapports de force a suscité un très grand nombre d'analyses, notamment dans le champ des [[sciences sociales]], à partir du {{s-|XIX|e}}., même si on retrouve des traces de cette réflexion de façon bien antérieure.
 
* L'historien grec [[Thucydide]] relate dans son ''[[Histoire de la guerre du Péloponnèse]]'' un débat entre les [[Athènes|athéniens]] et les habitants de l'île de [[Milos|Mélos]], située dans le sud de la Mer Égée, à l'est de [[Sparte]]. Ce dialogue est emblématique du conflit entre raison morale et raison du plus fort. Les Athéniens exigent que les Méliens se soumettent et paient un tribut, sous peine de voir leur cité détruite. Les Méliens affirment leur droit de rester neutres, faisant appel au sens de la justice des Athéniens et à leur compassion envers une petite cité pacifique et sans défense. Les Athéniens répondent sèchement que la justice ne s'applique pas entre puissances inégales, et mettent le siège devant Mélos comme ils avaient menacé de le faire ; ayant affamé la ville et obtenu après plusieurs mois sa [[Reddition (militaire)|reddition]], ils tuent les hommes en âge de se battre et réduisent en esclavage les femmes et les enfants.
L'observation de ces rapports de force a suscité un très grand nombre d'analyses, notamment dans le champ des [[sciences sociales]], à partir du {{s-|XIX|e}}.
{{article détaillé|Dialogue mélien}}
 
* Au {{s-|XVI|e}}, [[Nicolas Machiavel]] <ref> {{Lien web|url=http://forum.philagora.net/showthread.php?t=20193|titre=Philagora}} </ref> estime que les rapports de force sont [[Fatalité|inéluctables]] : le plus faible n’est jamais assez fort pour prendre l’avantage sur son adversaire (''[[Le Prince]]'', 1532). Plus tard, [[Étienne de La Boétie]] s'attache à démontrer que tout [[pouvoir politique]] s'appuie sur la [[légitimité]] qu'on veut bien lui accorder et il s'étonne de la facilité avec laquelle la plupart de ses contemporains le lui accorde (''[[Discours de la servitude volontaire]]'', 1574).
On citera ici quelques exemples depuis la [[Renaissance]].
 
* Au {{s-|XVII|e}}, dans sa fable ''[[Le Loup et l'Agneau]]'', [[Jean de La Fontaine]] rappelle que les rapports de force sont d'abord fondés sur des différences entre capacités physiques.
* Au {{s-|XVI|e}}, [[Nicolas Machiavel]] <ref> {{Lien web|url=http://forum.philagora.net/showthread.php?t=20193|titre=Philagora}} </ref> estime que les rapports de force sont [[Fatalité|inéluctables]] : le plus faible n’est jamais assez fort pour prendre l’avantage sur son adversaire (''[[Le Prince]]'', 1532). Plus tard, [[Étienne de La Boétie]] s'attache à démontrer que tout [[pouvoir politique]] s'appuie sur la [[légitimité]] qu'on veut bien lui accorder et il s'étonne de la facilité avec laquelle la plupart de ses contemporains le lui accorde (''[[Discours de la servitude volontaire]]'', 1574).
[[File:Jean-Jacques_Rousseau_(painted_portrait).jpg|thumb|100px|[[Jean-Jacques Rousseau|Rousseau]]]]
[[File:Karl_Marx_001.jpg|thumb|100px|[[Karl Marx|Marx]]]]
* Au {{s-|XVII|e}}, dans sa fable [[Le Loup et l'Agneau]], [[Jean de La Fontaine]] rappelle que les rapports de force sont d'abord fondés sur des différences entre capacités physiques.
 
* Au {{s-|XVII|e}}, [[Blaise Pascal]] fait remarquer qu'aucune loi ne peut s'exercer sans recours à la force, et d'une force qui, seule, ne représente aucune légitimité de droit : ''La justice sans la force est impuissante ; la force sans la justice est tyrannique. La justice sans force est contredite, parce qu'il y a toujours des méchants. La force sans la justice est accusée. Il faut donc mettre ensemble la justice et la force, et pour cela faire que ce qui est juste soit fort ou que ce qui est fort soit juste ''<ref> {{Lien web|url=http://www.ac-grenoble.fr/PhiloSophie/logphil/notions/justice/methode/sujets/comment/justfort/justforc.htm|titre=Rapport entre Justice et force}} </ref>.
[[File:Jean-Jacques_Rousseau_(painted_portraitpainted portrait).jpg|thumb|100px|[[Jean-Jacques Rousseau|Rousseau]].]]
 
* Au {{s-|XVIII|e}}, [[Jean-Jacques Rousseau]] se demande si le droit n'est pas un simple voile destiné à couvrir pudiquement la réalité de la force, "''« Bien instruit de mes devoirs et de mon bonheur, je ferme le livre, sors de la classe, et regarde autour de moi ; je vois des peuples infortunés gémissants sous le joug de fer, le genre humain écrasé par une poignée d'oppresseurs''" »<ref> {{Lien web|url=http://www.ac-grenoble.fr/PhiloSophie/logphil/notions/justice/methode/sujets/comment/injusloi/injusloi.htm|titre=Rousseau}} </ref>. Selon lui, « le plus fort n’est jamais assez fort pour être toujours le maître, s’il ne transforme sa force en droit, et l’obéissance en devoir. De là le droit du plus fort...fort… »<ref>[[Jean-Jacques Rousseau]], ''[[Du Contrat social]]'', l. I, ch.chapitre III, « Du droit du plus fort »</ref>). AÀ la "« loi du plus fort" », Rousseau oppose en 1762 "« le [[Contractualisme|contrat social]]" », condition minimale selon lui pour qu'un groupe ou toute une société puisse [[Résolution de conflit|régler ses conflits]] et vivre en harmonie.
 
* Au milieu du {{s-|XIX|e}}, les approches sont extrêmement contrastées. En 1807, au début du siècle, le philosophe allemand [[Georg Hegel]] nuance ce rapport de force dans son ouvrage : la ''[[Phénoménologie de l'Esprit]]''. Hegel explique que le rapport de force entre deux parties n'est pas une simple opposition mais s'inscrit dans un mouvement [[dialectique]]. Pour Hegel, il n'y a pas seulement victoire du camp le plus fort, mais en réalité un processus symétrique d'action réciproque qui, s'il avantage temporairement le maître, finit toujours par se retourner contre lui au profit de l'esclave.
 
{{article détaillé|Dialectique du maître et de l'esclave|Georg Wilhelm Friedrich Hegel}}
[[File:Karl_Marx_001.jpg|thumb|100px|[[Karl Marx|Marx]].]]
* En poussant plus loin la pensée hégélienne, [[Karl Marx]] voit dans la [[domination]] du [[prolétariat]] par la [[bourgeoisie]] la cause d'[[inégalités sociales]] menant à l'inévitable révolution du [[prolétariat]] et l'aboutissement du [[communisme]]. AÀ l'inverse, s'appuyant sur les travaux du biologiste [[Lamarck]] et du [[Paléontologie|paléontologue]] [[Charles Darwin]], [[Herbert Spencer]], rend légitime ces rapports de force. Pour illustrer la vision de Marx, une citation circule alors sur laquelle, aujourd'hui encore, s'appuient les détracteurs du [[Libéralisme économique|libéralisme]] pour fustiger celui-ci : "« la liberté, c'est celle du [[renard]] libre dans un [[poulailler]] libre" ». Son origine est incertaine.
 
* Au {{s-|XX|e}}, [[Michel Foucault]] distingue la règle et la loi <ref> {{Lien web|url=https://books.google.fr/books?id=l31NvdIzQYgC&pg=PA76&lpg=PA76&dq=Loi+du+plus+fort+Foucault&source=bl&ots=Jly_vOW7i0&sig=Q4uwwFsG-UMH27ULE4VrReqqR_g&hl=fr#v=onepage&q=Loi%20du%20plus%20fort%20Foucault&f=false|titre=Michel Foucault : ''Subjectivité, pouvoir, éthique''}} </ref> et [[Pierre Bourdieu]] élabore toute une théorie de la domination en puisant chez [[Karl Marx]] (la société comme théâtre d’une lutte entre groupes sociaux aux intérêts antagonistes) et chez [[Max Weber]] (les rapports de domination sont aussi des rapports de sens, et sont perçus comme légitimes).
* En poussant plus loin la pensée hégélienne, [[Karl Marx]] voit dans la [[domination]] du [[prolétariat]] par la [[bourgeoisie]] la cause d'[[inégalités sociales]] menant à l'inévitable révolution du [[prolétariat]] et l'aboutissement du [[communisme]]. A l'inverse, s'appuyant sur les travaux du biologiste [[Lamarck]] et du [[Paléontologie|paléontologue]] [[Charles Darwin]], [[Herbert Spencer]], rend légitime ces rapports de force. Pour illustrer la vision de Marx, une citation circule alors sur laquelle, aujourd'hui encore, s'appuient les détracteurs du [[Libéralisme économique|libéralisme]] pour fustiger celui-ci : "la liberté, c'est celle du renard libre dans un poulailler libre". Son origine est incertaine.
 
* Au {{s-|XX|e}}, [[Michel Foucault]] distingue la règle et la loi <ref> {{Lien web|url=https://books.google.fr/books?id=l31NvdIzQYgC&pg=PA76&lpg=PA76&dq=Loi+du+plus+fort+Foucault&source=bl&ots=Jly_vOW7i0&sig=Q4uwwFsG-UMH27ULE4VrReqqR_g&hl=fr#v=onepage&q=Loi%20du%20plus%20fort%20Foucault&f=false|titre=Michel Foucault : ''Subjectivité, pouvoir, éthique''}} </ref> et [[Pierre Bourdieu]] élabore toute une théorie de la domination en puisant chez [[Karl Marx]] (la société comme théâtre d’une lutte entre groupes sociaux aux intérêts antagonistes) et chez [[Max Weber]] (les rapports de domination sont aussi des rapports de sens, et sont perçus comme légitimes).
 
== Notes et références ==
{{Références}}
 
== Liens internesAnnexes ==
=== Articles connexes ===
{{Colonnes|taille=|nombre=3|
* [[Anomie]]
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* [[Violence symbolique]]
* [[Volonté de puissance]]
* [[Væ victis]]
}}
 
=== Liens externes ===
* {{Lien web|url=http://www.philolog.fr/du-droit-du-plus-fort-rousseau/|titre=Philolog}}
* {{Lien web|url=http://www.ac-grenoble.fr/PhiloSophie/logphil/notions/politic/methode/sujets/dissert/plufort/fort.htm/|titre=Maryvonne Longeart}}
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[[Catégorie:Sociologie des rapports sociaux]]
[[Catégorie:Citation d'origine militaire]]
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