La Grèce sur les ruines de Missolonghi
La Grèce sur les ruines de Missolonghi est un tableau réalisé par Eugène Delacroix en 1826. C'est une huile sur toile de 213 × 142 cm. L'œuvre représente une allégorie de la Grèce après le siège de Missolonghi. Elle est conservée au musée des Beaux-Arts de Bordeaux.
Artiste | |
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Date | |
Commanditaire | |
Type |
Huile sur toile |
Dimensions (H × L) |
213 × 142 cm |
Mouvement | |
No d’inventaire |
Bx E 439 |
Localisation |
Choix de l'artiste
modifierLa Grèce sur les ruines de Missolonghi est née d'une initiative très politique : Le Comité philhellène de Paris organise l'exposition du tableau à Paris, dans la galerie du marchand Lebrun. C'est une exposition payante, et l'argent récupéré doit revenir au comité pour soutenir les insurgés grecs.
Plutôt que de représenter la réalité de cet évènement récent, Delacroix choisit une figure de style : l’allégorie. C’est un choix audacieux car en 1826, c'est un genre délaissé par les artistes et Delacroix lui-même ne s'y est guère intéressé jusque-là. Mais la réalisation de cette œuvre est un projet particulier : il s'agit de dépasser le caractère d’actualité de l’événement pour proposer une réflexion sur le sens de l’histoire.
Quatre ans plus tard, Delacroix aura recours à nouveau à l'allégorie, avec son tableau le plus célèbre, La Liberté guidant le peuple (Paris, musée du Louvre).
Côme Fabre, commissaire d'exposition, retrace le contexte de la création de l’allégorie La Grèce sur les ruines de Missolonghi, à l'occasion de l'exposition "Delacroix (1798-1863)" en 2018 : "C’est un grand sujet romantique, c’est une guerre de libération de la Grèce, un peuple qui prend en main sa destinée et son indépendance donc ça ne peut que plaire à une jeunesse d’opinion libérale, nostalgique de l’Empire, qui a lu les Mémoires de Saint Hélène en se faisant d’ailleurs complètement tromper sur le sens de l’Histoire (…) Ça plait par cet élan de liberté, qui est une constante dans la carrière et les intérêts de Delacroix. Et en plus ça se passe en Grèce, qui est à cette époque un pays dans la mouvance orientale, ottomane depuis plusieurs siècles. Ça parait très intéressant pour un artiste comme Delacroix de représenter la Grèce qui n’est pas celle des statues en marbre des musées, mais une Grèce très colorée, très exotique, pittoresque et sensuelle . Delacroix n’y a jamais mis les pieds mais il la connaît à travers un filtre littéraire, de Lord Byron, héros qui est mort là-bas, à Missolonghi très précisément, des suites d’une fièvre. Il n’est pas mort au combat, je précise. Il fascine une génération de jeunes artistes romantiques parce qu’il a lié son engagement littéraire avec un engagement d’homme, de citoyen, au service de la liberté de ce Peuple."
Contexte historique et genèse
modifierAu moment de la création du tableau, la Grèce est sous domination ottomane depuis le milieu du XVe siècle. Mais 5 ans avant sa réalisation, une révolte éclate en Grèce qui mène à l'indépendance du pays un an plus tard (à travers l'assemblée nationale d'Épidaure), qui constitue le premier état grec en 1832. A la suite de ces événements politiques, un philhellénisme se répand dans toute l'Europe, notamment à Paris où des comités organisent des levées de fonds en soutien aux révoltés. Des poètes et écrivains se passionnent pour la naissance des arts et la philosophie Grecque tel que Victor Hugo et François René de Chateaubriand en France et Lord Byron en Angleterre. Ce dernier se rendra à Missolonghi en 1824 et y mourra quatre mois plus tard de la maladie. Ce destin de poète tragique rappelle le destin tragique des Grecs lors de la chute de la ville de Missolonghi dans la nuit du 22 au 23 avril 1826, n'épargnant que peu de survivants. Cette œuvre romantique sert d'hommage à la mort de Lord Byron et représente l'allégorie de la Grèce, luttant pour son indépendance.
Le Siège de Missolonghi
modifierVoir la page Wikipédia, le Siège de Missolonghi.
Description
modifierLa scène représente une femme au centre de la composition portant le costume traditionnel grec (robe blanche échancrée avec un manteau bleu foncé, écharpe jaune à la taille, couvre-chef aux motifs colorés), représentant ainsi la Grèce personnifiée. Elle surplombe des roches ensanglantées sous lesquelles le bras d'un cadavre émerge des ruines. Ce sont les seuls éléments violents de la composition.
Les premiers croquis de Delacroix montrent une femme animée de gestes violents traduisant une sensation d’effroi ou de malédiction. Toutefois, la composition finale présente une femme accueillante, les bras largement ouverts, les jambes fléchies et appuyées sur les ruines. Avec un regard de tristesse en direction du ciel et sa position agenouillée, elle adopte une attitude de résignation face au sacrifice qui lui est destiné.
A l'arrière-plan se situe un homme à la peau mate vêtu d'un costume oriental (un sarouel rouge recouvert d'un manteau noir resserré à la taille par une ceinture portant des pistolets). L'homme, coiffé d'un turban, observe vers la gauche du tableau, plantant son étendard sur le sol grec. Il semble indifférent à la femme du premier plan.
Signification
modifierAu centre du tableau, la femme incarne la Grèce. Elle apparaît à la fois comme la victime et l'héroïne de la scène. Sa posture et son regard semblent implorer l’aide des autres nations, elle semble accepter le sacrifice qui lui est imposé par sa posture agenouillée. Cette scène symbolise la violente s'étant abattue sur le peuple grec lors des révoltes.
Les couleurs du tableau jouent également un rôle crucial dans la signification du tableau. Le rouge, vif et intense, évoque le sang versé par les victimes sacrifiées du peuple grec. À l’opposé, le blanc de la robe de la femme symbolise son innocence et sa pureté, soulignant la tragédie de son destin. Ce contraste amplifie l'émotion de la scène en favorisant la dimension dramatique.
Dans un coin de la composition, une main émerge des décombres, pour rappeler les vies perdues à cause des atrocités de la guerre. Ce détail renforce l'idée de sacrifice et ajoute une profondeur tragique à la composition.
Notes et références
modifierhttps://www.musee-delacroix.fr/fr/collection/dessins/etude-pour-la-grece-sur-les-ruines-de-missolonghi-et-la-liberte-guidant-le-peuple -Musée Delacroix
https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/les-nuits-de-france-culture/l-art-est-la-matiere-delacroix-1798-1863-la-fureur-de-peindre-1ere-diffusion-01-04-2018-8595130 - France Culture, Delacroix, la fureur de peindre
https://pop.culture.gouv.fr/notice/joconde/000PE020100 POP la plateforme ouverte au patrimoine
https://www.musba-bordeaux.fr/fr/article/la-grece-sur-les-ruines-de-missolonghi Musée des Beaux Arts de Bordeaux
Bibliographie
modifier- Sophie Barthélémy et Stéphanie Trouvé (dirs.), Collections du musée des Beaux-Arts de Bordeaux : Les Essentiels, Liénart éditions, 2019, pp.132–133 (ISBN 9782359062762).
Liens externes
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- Ressources relatives aux beaux-arts :
- Fiche du musée des Beaux-Arts de Bordeaux