ENTRETIEN
Oulipo, création mobile Entretien avec Jacques Neefs
Marcel Bénabou, Jacques Jouet, Hervé Le Tellier, Jacques Roubaud,
Depuis sa création en novembre 1960 par Raymond Queneau et François Le Lionnais, l'OUvroir de Littérature Potentielle s'est donné pour tâche de réhabiliter l'usage de la contrainte pour la production de textes littéraires. Nous appelons littérature potentielle la recherche déformés, de structures nouvelles et qui pourront être utilisées par les écrivains de la façon qui leur plaira : cet énoncé de Queneau est resté la charte de l'activité du groupe.
Les membres du groupe
Autour de Raymond Queneau et de François Le Lionnais, se sont d'abord réunis : Noël Arnaud, Jacques Bens, Claude Berge, Paul Braffort, Jacques Duchateau, Latis, Jean Lescure, Jean Queval, Albert-Marie Schmidt. Ont ensuite été successivement cooptés : Jacques Roubaud (1966), Georges Perec (1967), Marcel Bénabou, Luc Étienne (1969), Paul Fournel, Harry Mathews, Italo Calvino (1974), Michèle Métail (1975), François Caradec, Jacques Jouet (1983), Pierre Rosenstiehl (1986), Hervé Le Tellier (1992), Oskar Pastior (1993), Michelle Grangaud, Bernard Cerquiglini (1995), Ian Monk (1998), Olivier Salon, Anne Garréta (2000).
Les publications du groupe
La littérature potentielle, Gallimard, 1973 (2e édition, Folio, 1988, 3e édition 1999).
Atlas de littérature potentielle, Gallimard, 1981, (2e édition, Folio, 1988, 3e édition 1995).
La Bibliothèque Oulipienne, volumes 1, 2, 3 : éditions Seghers, 1990.
La Bibliothèque Oulipienne, volume 4, édition Le Castor Astral, 1997.
La Bibliothèque Oulipienne , volume 5, édition Le Castor Astral, 2000.
Jacques Neefs -Oulipo, en tant qu'auteur collectif, et Oulipo en tant que groupe d'auteurs singuliers, s'intéres¬ sent-ils aux brouillons ?
Oulipo -L' Oulipo s'intéresse aux brouillons de multiples façons, très différentes les unes des autres. L' Oulipo, en tant que groupe, s'intéresse aux brouillons, ou à une partie des brouillons des œuvres oulipiennes, en particulier de celles qui ne sont pas encore des œuvres oulipiennes mais des projets proposés à la création. Il s'agit de ces créations qui sont obligatoirement présentées à chaque séance, et sans lesquelles la séance ne serait pas valable. Marcel Bénabou aime bien, en tant qu'archiviste, avoir les traces de ce que les oulipiens apportent, et telles qu'ils les apportent. Par exemple, Jacques Roubaud, aux temps anciens, apportait des petits bouts de papier mal écrits. Mais maintenant il
Genesis 15, 2000
n'apporte plus de brouillons, il apporte de vrais textes, mis au propre, soigneusement « macintoshés ».
En fait, il est difficile de parler d'un texte oulipien sans brouillon : cela n'existe pratiquement pas, parce que n'im¬ porte quel texte sous contrainte demande un travail de préparation, souvent considérable. Il y a beaucoup de maté¬ riau, et ce matériau va pouvoir servir à d'autres contraintes encore, les contraintes existant toujours « en famille ».
Un brouillon oulipien n'est pas limité à l'exercice pour lequel il a été élaboré. Par exemple, la constitution d'un corpus compilé par x ou par y peut servir à venir à bout d'autres travaux. Des travaux qui vont être connexes par
1. Troll de tram, Le tramway de Strasbourg, «La Bibliothèque oulipienne», n° 68.