Céramiques à glaçure plombifère

Les céramiques à glaçure plombifère sont de la vaisselle de table dont la glaçure est à base de plomb, ce qui rend la pièce étanche.

Broc à glaçure plombifère de type Toby Jug (en) (Grande-Bretagne, fin du XVIIIe siècle — Victoria and Albert Museum de Londres).

Apparue au Moyen-Orient au deuxième millénaire avant notre ère, elle a persisté presque jusqu'à nos jours ; mais la toxicité du plomb l'a fait interdire ou mettre sa fabrication sous contrôle dans plusieurs pays.

Technique, couleurs, composants

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Sur des pièces pré-cuites au biscuit, est déposé un revêtement à base d'oxyde de plomb (PbO, minium) mélangé avec un peu d'eau. Cette glaçure est ensuite vitrifiée lors d'une deuxième cuisson[1] à environ 900 °C[2] (cuisson à basse température).

Selon Dubois, si l'oxyde de plomb est pur, le résultat est une couleur jaune-vert[1] ; mais Barber dit qu'une glaçure composée essentiellement ou uniquement de plomb intensifie la couleur de la pâte et la rend plus sombre, comme si elle était recouverte d'une couche épaisse de vernis[3].

Si la glaçure contient des oxydes de fer[1], la couleur devient vert mat[2], olivâtre à brun. La couleur peut être délibérément modifiée en ajoutant d'autres oxydes métalliques comme de l'oxyde de fer précité, ou de l'oxyde de cuivre (CuO) ou oxyde de manganèse (MnO)[1]. La couleur verte peut être obtenue en ajoutant à la glaçure une petite quantité de composé étain-cuivre ; une source possible pour ce cuivre est le bronze oxydé[4].

 
L'extraction de plomb sur des récipients en terre cuite donne un liquide jaune et brillant. La couleur jaune indique la présence de plomb dans le vase.

Cette technique peut imiter les vases en verre[2] : l'oxyde de plomb et la silice se combinent[5], comme dans le verre.

Avec l'âge, les objets perdent souvent leur brillant : les éléments chimiques du sol réagissent avec la glaçure, qui a tendance à s'écailler et à devenir mate ; mais parfois ce processus engendre une belle iridescence[2] ou un aspect laiteux[4]. Les craquelures et écaillements ne sont pas seulement dus à l'âge ou à l'environnement : comme la cuisson est à basse température, la glaçure devient alors plus dure que la pâte ; d'où le risque d'écaillement ou de craquèlement[3]. Le cuivre tend à déstabiliser les glaçures plombifères, ce qui accentue les dégradations dans les poteries vertes par rapport aux poteries marron[4]. Une poterie Han orientale analysée a révélé un pourcentage inhabituellement élevé d'oxyde de baryum, caractéristique courante pour le verre de la même époque contenant du plomb ; cette poterie est peut-être une sorte de transition entre le verre chinois précoce et les technologies de cuisson de poterie à basse température. Le minerai de plomb peut contenir une quantité notable de baryum[6], mais le baryum présent dans la glaçure ne provient nécessairement d'impuretés dans le minéral utilisé : il peut avoir été introduit délibérément[7].

Décors

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La poterie à glaçure plombifère commune peut être groupée en quatre catégories :

  • poterie glaçurée lisse
  • poterie incisée, à sgraffito
  • poterie décorée ou peinte à la barbotine
  • poterie moulée[8].

Historique

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Vase à glaçure plombifère de Syrie, moulé en forme de grappe de raisin
(British museum)

Origine et Antiquité

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Cette technique apparaît pendant le deuxième millénaire avant notre ère au Moyen-Orient. La pratique d'ajouter d'autres oxydes métalliques est attestée en Mésopotamie dès l'époque babylonienne. Ce type de céramique se développe pendant l'époque hellénistique (-323 - -30), plus particulièrement à Smyrne. Au Ier siècle av. J.-C.[1], les trois principaux centres de production connus sont en Asie Mineure[9] : ainsi elle est produite à Alexandrie mais la diffusion de ce centre de production reste assez limitée : les fouilles de Tanis (dans le delta du Nil) n’en ont livré aucun fragment malgré la proximité d'Alexandrie[1]. Seuls les ateliers de Tarse (en Turquie), qui commencent leur production vers le milieu du Ier siècle av. J.-C.[9], diffusent leurs produits dans la deuxième moitié du Ier siècle[1] jusque dans l'Occident méditerranéen, dont les régions transalpines[9].

Les céramiques à glaçure plombifère commencent à être produites en Occident à partir du milieu du Ier siècle av. J.-C., avec l’arrivée de la production de Tarse. On la note en Italie du Nord (Hochuli-Gysel 1981)[1], ou elle est adaptée aux formes et aux modes de décoration régionaux (Maccabruni 1987)[9].

Vers 40/30 av. J.-C., la glaçure plombifère commence à être appliquée en Gaule lyonnaise, plus précisément à Saint-Romain-en-Gal près de Vienne (Desbat 1985) et à l'atelier de Loyasse à Lyon[10] où l'on prosuit aussi des gobelets moulés, dit "d'Aco", des skyphoï (Desbat 1987, Pl. 1-1), des canthares et des gobelets à décor clouté (Leblanc 1998). Ces ateliers semblent rapidement abandonnés, mais les potiers (ou les héritiers de leurs techniques) s'installent aussitôt dans un autre secteur de Lyon ("La Muette"[10]), où ils sont attestés jusque vers 10/1 avant notre ère[1].

L'atelier de Saint-Rémy-en-Rollat (Allier) est le principal atelier du centre de la Gaule fabricant des céramiques à glaçure plombifère, à pâte blanche et glaçure jaune, rose ou verte. Ces pièces, produites à partir de l'époque de Tibère jusqu'au IIe siècle, se retrouvent principalement dans le centre et l’ouest de la Gaule, et en Bretagne[9]. Le sanctuaire gallo-romain de Mazamas, sur la commune de Saint-Léomer dans la Vienne, a livré des fragments une gourde de ce type de céramique provenant de Saint-Rémy, décorée d'une tête de méduse[11].

En Chine, la glaçure au plomb est utilisée au plus tard pendant la dynastie Han orientale (206 à 220 apr. J.-C.)[6].

Moyen-Âge

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Époque moderne

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Paon par Paul Comolera, Minton, vers 1870, majolique à glaçure plombifère. Musée des Poteries (en), Stoke-on-Trent, Angl.

Époque contemporaine

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Toxicité

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La Food & Drug Administration (FDA) américaine reconnaît que si les pièces sont cuites à une température appropriée, le plomb se retrouve lié à la glaçure et les risques d'empoisonnement sont alors pratiquement nuls. Mais si le four utilisé pour la cuisson de poteries sans plomb a été auparavant utilisé pour cuire des poteries avec du plomb, des particules de plomb peuvent contaminer les pièces en se déposant dessus tout en ne fusionnant pas avec la glaçure, et peut alors devenir une source de contamination. Pour autant, la vente de céramiques à glaçure plombifère n'est pas interdite aux États-Unis à condition d'être correctement labellisée. La FDA recommande aussi de ne pas utiliser les céramiques plombifères affectées des caractères suivants : faites à la main avec une apparence rustique ou une forme irrégulière ; objet antique ; pièce très usée ou abîmée : pièce acquise sur un marché aux puces ou à des vendeurs des rues, ou pièce dont on ne peut pas déterminer la fabrication par un potier de bon standard ; pièce décorée de couleurs brillantes rouges, orange ou jaunes (le plomb étant souvent utilisé pour rehausser l'intensité de ces couleurs)[12].

Notes et références

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Références

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  1. a b c d e f g h et i Dubois 2003.
  2. a b c et d Victor Bryant, « chap. 8 : Ceramics in the Roman WorldEastern Glaze Discoveries → 2 : Lead Glazed Pottery », dans « Ceramic Web Page Tutorials », sur ceramicstudies.me.uk (consulté en ).
  3. a et b Barber 1907, p. 5.
  4. a b et c Wood 1999, p. 193.
  5. Daniel Paunier, La céramique gallo-romaine de Genève, de la Tène finale au royaume burgonde (Ier siècle av. J.-C.-Ve siècle apr. J.-C., Genève / Paris, A. Jullien / H. Champion, (lire en ligne), p. 35.
  6. a et b Wood 1999, p. 194.
  7. Wood 1999, p. 195.
  8. Barber 1907, p. 6.
  9. a b c d et e Passelac 1993, p. 430.
  10. a et b Martine Genin, Jacques Lasfargues et Anne Schmitt, « Les productions de l'atelier de Loyasse », Gallia, vol. 53,‎ , p. 19-38 (ISSN 0016-4119, lire en ligne, consulté le ).
  11. Marie-Reine Aucher, Michel Aucher, S. De Lavergne et E. De Lavergne, « Tête de méduse sur flanc de gourde de Saint-Rémy-en-Rollat (Allier) », RACF, vol. 17, nos 1-2,‎ , p. 87-88 (ISSN 1159-7151, lire en ligne, consulté le ).
  12. « Questions and Answers on Lead-Glazed Traditional Pottery », Food & Drug Administration (É.-U.), sur fda.gov (consulté en ).

Voir aussi

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Bibliographie

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  : document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.

  • [Barber 1907] (en) Edwin Atlee Barber, Lead glazed pottery. Part first (common clays): plain glazed, sgraffito and slip-decorated wares, Philadelphie, Musée de Pennsylvanie, coll. « Art Primer / Ceramic » (no 3), (lire en ligne).  
  • [Corrocher 1983] Jacques Corrocher, « La céramique à glaçure plombifère de Vichy (Allier) », Revue archéologique du Centre de la France, vol. 22, no 1,‎ , p. 15-40 (lire en ligne, consulté le ).
  • [Dubois 2003] Stéphane Dubois, « Aperçu des céramiques à glaçure plombifère de l'Occident romain », sur galliabelgica.free.fr, (consulté le ).  
  • [Hochuli-Gysel 1977] (de) Anne Hochuli-Gysel, Kleinasiatische glasierte Reliefkeramik (50 v. Chr. bis 50 n. Chr.) und ihre oberitalienischen Nachahmungen, Bern, Stämpfli, (ISBN 3-7272-0511-3).
  • [Hochuli-Gysel 2002] Anne Hochuli-Gysel, « La céramique à glaçure plombifère d'Asie Mineure et du bassin méditerranéen oriental (du Ier s. av. J.-C. au Ier s. ap. J.-C.) », dans Francine Blondé, Pascale Ballet et Jean-François Salles (dir.), Céramiques hellénistiques et romaines, productions et diffusion en Méditerranée orientale (Chypre, Égypte et côte syro-palestinienne), Lyon, Maison de l'Orient et de la Méditerranée Jean Pouilloux, coll. « Travaux de la Maison de l'Orient méditerranéen » (no 35), , sur persee (lire en ligne), p. 303-319.
  • [Passelac 1993] Michel Passelac, « Céramique romaine à glaçure plombifère » [PDF], Lattara 6, (consulté le ).  
  • [Wood 1999] Nigel Wood, Chinese Glazes: Their Origins, Chemistry, and Recreation [« Les glaçures chinoise : leurs origines, chimie et re-création »], Londres, A & C Black, (ISBN 0-7136-3837-0, lire en ligne), p. 193.  

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