Léon Cohen
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Nom dans la langue maternelle |
Λεών Κοέν |
Nationalités |
israélienne (à partir des années 1970) grecque |
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Léon Cohen ( grec moderne : Λεών Κοέν ; né le 15 janvier 1910 à Thessalonique, Grèce et mort en août 1989 à Bat Yam, Israël ), était un survivant juif d'Auschwitz. Il a été membre du Sonderkommando à Birkenau de mai à novembre 1944. Il était l'un des trois seuls membres du Sonderkommando à avoir écrit ses mémoires après la guerre[1] avec Filip Müller[2] et Marcel Nadjari[3]. Il a participé à la préparation du soulèvement du Sonderkommando.
Biographie
[modifier | modifier le code]Le père de Leon Cohen était un marchand aisé et prospère, qui importait des marchandises d'Allemagne et d'Autriche et entretenait des relations commerciales avec de petits marchands à Bruxelles.
Léon Cohen avait deux sœurs, Agnès et Margot, et un frère, Robert. Il est allé à l'école de commerce Léon Gatenyo, une institution franco-allemande, où il reçut une solide éducation française et apprit les belles lettres. Après avoir obtenu son diplôme, il a d'abord travaillé à la foire internationale de Thessalonique. Plus tard, il a travaillé pour Decca Records, une entreprise qui vendait des disques et des postes de radio.
Avant l'occupation, il était fournisseur officiel du ministère grec de la Défense. Plus tard, il a été enrôlé dans l'armée grecque.
Il est arrêté en 1942, comme des milliers de jeunes hommes juifs, et envoyé à la prison allemande de Thessalonique, d'où il s'évade.
Le 15 janvier 1943, il épousa sa première femme, Germaine Perahia, la fille de Yehoshua Perahia, propriétaire de la Bank Union (avec Joseph Nehama) à Thessalonique.
La plupart des Juifs de Thessalonique ont été parqués par les Nazis dans deux ghettos, dont il parvint à s'échapper avec sa femme.
Mais arrivé à Athènes, il fut arrêté par les Allemands, tandis que sa femme et ses parents se cachaient[4], et envoyé à Haidari.
Expériences à Auschwitz
[modifier | modifier le code]Il est déporté d'Athènes, le 2 avril 1944, et arrive à Auschwitz, le 11 avril. Sa mère et sa sœur cadette Margot, qui était enceinte, furent assassinées dès leur arrivée.
Cohen est l'un des 320 hommes grecs sélectionnés pour le travail (numéros de série de 182440 à 182759). Son numéro est le 182492.
Il disposait d'un atout vital, parler allemand, alors que la plupart des Juifs séfarades de Thessalonique ne parlaient que le grec, le ladino, l'italien ou le français. De ce fait, les séfarades étaient la plupart du temps isolés dans le camp, en particulier par rapport aux autres Juifs qui parlaient majoritairement en yiddish[5].
Après avoir passé deux jours dans le Sauna de Birkenau, lui et les autres hommes grecs ont vécu en quarantaine, dans le bloc 12, du 13 avril au 11 mai. Puis, il a été sélectionné, avec 100 Grecs, pour faire partie du Sonderkommando[6].
Après quelques jours dans les fosses de crémation du Bunker 2 et au Crematorium IV, il a été définitivement affecté au Crematorium III en tant que « dentiste » ou Zähnekontrolle (c'est-à-dire examiner la bouche des personnes qui ont été assassinées et arracher leurs dents en or)[7],[8].
Il assiste à la destruction des juifs hongrois, durant l'été 1944, à l'évacuation définitive du camp familial (du 10 au 12 juillet) et au gazage des gitans début août.
Comme de nombreux témoins, il se souvient de la cruauté du Hauptscharführer Otto Moll.
Au Crematorium III, il rencontre le peintre français David Olère et est très proche de l'industriel français Hersz Strasfogel[9].
Il participe à la préparation du soulèvement du Sonderkommando, prévu pour le 7 octobre 1944, aux côtés de Yaacov Kaminski, Lemke Chaïm Pliszko, Dawid Kotchak, Giuseppe Baruch, Leibl Paul Katz, Marcel Nadjari et Alberto Errera. Mais, le moment venu, les prisonniers du Crematorium III ne purent participer à la rébellion et furent rapidement encerclés par les Allemands.
Au moment de l'arrêt des chambres à gaz, à la mi-novembre 1944, Cohen et ses camarades sont enrôlés dans l'Abbruchkommando Krematorium, c'est-à-dire l'unité chargée de la démolition des Crematoriums (environ 70 prisonniers).
Le 18 janvier 1945, les SS ont commencé à évacuer Auschwitz et les quelques milliers de détenus en état de marcher ont été évacués du camp lors d'une marche de la mort. Alors que les membres du Sonderkommando n'aient pas été autorisés à se mêler aux autres détenus et à quitter le camp, Cohen et d'autres membres du Sonderkommando se sont mêlés à la foule de prisonniers (une centaine de membres du Sonderkommando se sont ainsi échappés du camp).
Il est envoyé au camp de Mauthausen, puis vers ceux de Melk, Linz, Gusen et Ebensee dont il est libéré, le 6 mai 1945, par la 80e division d'infanterie de l'armée américaine. Presque mort, il est soigné à l'hôpital (entre 40 et 50 anciens membres du Sonderkommando ont survécu après la libération des camps).
Après Auschwitz
[modifier | modifier le code]Il retourna à Thessalonique, en août 1945. Il a eu deux enfants, Lily et Jean-José[10],[11].En 1946, il rencontre à Paris la fille de Hersz Strasfogel, membre du Sonderkommando devenu un ami proche et tué lors d'une Selektion en novembre 1944 par les Allemands et à qui il avait promis de rendre visite à sa famille s'il survivait.
En 1972, il s'installe en Israël à Bat Yam avec sa seconde épouse.
Il a été interviewé trois fois par l'historien israélien Gideon Greif [12] et a écrit un livre en français : De la Grèce à Birkenau, le soulèvement des ouvriers des crématoires . Il n'a reçu aucune réparation de l'Allemagne, en raison de lenteurs bureaucratiques ou de négligence.
Sa santé se détériora et il mourut en 1989 à Bat Yam.
Des extraits sélectionnés de son livre sont apparus en hébreu dans la revue Pe'amim [13] en 1986 et une édition anglaise de ses mémoires est sortie en 1996[14]. Malheureusement, le manuscrit original en français est perdu et il manque à cette édition le début en Grèce et la fin à Mauthausen.
Leon Cohen est mentionné par de nombreux survivants : Ya'akov Gabbai[15], Shaul Chazan[16], Shlomo Dragon[17], Jozef Sackar[18], Marcel Nadjari[19], Daniel Bennhamias[20], Jacques Stroumsa et Shlomo Venezia[7].
Références
[modifier | modifier le code]- Voir Gideon Greif, We wept without tears, Yale University Press, 2005, p. 80 : Only five former members of this unit published memoirs : Marcel Nadjari, Leon Cohen, Filip Müller, Miklos Nyiszli, and Zalman Gradowski. On peut considérer que le dernier auteur mentionné par le Dr Greif, le Dr Miklos Nyiszli, n'était pas réellement membre des Sonderkommando, puisqu'il réalisait des autopsies pour le Dr. Josef Mengele, quand bien même il vivait avec les membres du Sonderkommando. Les autres livres au sujet des membres des Sonderkommando, tels que ceux Shlomo Venezia ou Daniel Bennahmias, sont des témoignages ou entretiens et pas, à strictement parler, des mémoires.
- Filip Müller, Eyewitness Auschwitz: Three Years in the Gas Chambers, Stein and Day, 1979.
- Marcel Nadjary, Χρονικό 1941–1945 [Chronicle], Ιδρυμα Ετσ - Αχα'ι'μ, Thessaloniki, 1991.
- Ya'akov Gabai: I'll Get Out of Here! in Gideon Greif, We wept without tears, Yale University Press, 2005, p. 209: L'un des Sonderkommando, un grec nommé Léon Cohen, est encore en vie. Il s'est marié à la fille d'un administrateur de banque de Thessalonique. Lorsque Cohen a été capturé et déporté à Auschwitz, son épouse s'enfuit avec son père.
- Shaul Chazan: Life Didn't Matter Anymore, Death Was Too Close in Gideon Greif, We wept without tears, Yale University Press, 2005, p. 263: I remember that Leon Cohen was the only one of us who spoke German..
- See Auschwitz by Tal Bruttmann : as early as 16 May 1944, four convoys, each carrying 3,000 Jews from Hungary in 45 wagons, had to leave Hungary daily for Auschwitz. After being removed from Auschwitz in November 1943 by order of Himmler, Rudolf Höss was called back to the camp commandment to prepare the site for the scheduled mass arrival (Aktion Höss). On 9 May, orders are given to increase the number of prisoners of the Sonderkommando and Kanada Kommando (see Auschwitz Chronicle by Danuta Czech). In mid-April, the number of Sonderkommando prisoners stood at 207. On May 15, a contingent of 100 men is taken from the quarantine camp among the Greek Jews selected on April 11.
- Shlomo Venezia & Béatrice Prasquier, Inside the Gas Chambers: Eight Months in the Sonderkommando of Auschwitz , Polity, 2011.
- See The dentist by Chaim Marin and Razia Israeli, a play for an actress based on "We Wept without Tears" by Gideon Greif, with actress Razzia Israeli. The play tells the story of the daughter of the "dentist" of Krematorium III, a Jew from Salonika who went living in Israel. http://www.theenglishtheatre.nl/stet-productions/2012/test-productie-2012-2.html
- Leon Cohen : From Greece to Birkenau p. 53. Picture of Hersz Strasfogel in Sonderkommando Auschwitz channel's video : . Hersz Strasfogel on the Shoah Memorial in Paris :
- http://www.cohen.gr - Προσωπική ιστοσελίδα Jean Cohen
- Conference by Jean Cohen on the Sonderkommando uprising : https://www.youtube.com/watch?v=_H0oWQoXvi8.
- Leon Cohen: We Were Dehumanized, We Were Robots in Gideon Greif, We wept without tears, Yale University Press, 2005, p. 286 .
- Pe'amim 27, Studies in Oriental Jewry, 1986.
- Leon Cohen, From Greece to Birkenau : the crematoria workers'uprising, translated from the French by Jose-Maurice Gormezano, postscript by Lily Eiss-Perahia nee Cohen, Salonika Jewry Research Center, 1996.
- Ya'akov Gabai: I'll Get Out of Here! in Gideon Greif, We wept without tears, Yale University Press, 2005, p. 181: Our group was made up mainly of Greek Jews, including Michel Arditti, Josef Baruch of Corfu, the Cohen brothers, Shlomo and Maurice Venezia, me and my brother Dario Gabbai, Leon Cohen, Marcel Nadjari, and Daniel Ben-Nachmias.
- Shaul Chazan: Life Didn't Matter Anymore, Death Was Too Close in Gideon Greif, We wept without tears, Yale University Press, 2005.
- Abraham and Shlomo Dragon: Together—in Despair and in Hope in Gideon Greif, We wept without tears, Yale University Press, 2005, p. 176: Almost all the Sonderkommando men who had survived to that time - about a hundred men - left Auschwitz on this march. They included Shmuel from France, Leibl from Grodno, Lemke Pliszko, David Nencel from Rypin, Moshe and Yankl Weingarten from Poland, Aba from Grodno, Berl Beirach from Luna, Sender from Berlin, Maurice from Greece, Leon Cohen from Salonika, and Shaul Chazan from Salonika.
- Josef Sackar: To Survive, so the Truth Would Come Out in Gideon Greif, We wept without tears, Yale University Press, 2005, p. 93: Among the Jews who survived, I remember the Gabai brothers, Shaul Chazan, the Venezia brothers - one of them is living in Italy now, the other is in America - and the late Leon Cohen.
- Marcel Nadjary, Χρονικό 1941–1945 [Chronicle], Ιδρυμα Ετσ - Αχα'ι'μ, Thessaloniki, 1991
- Rebecca Camhi-Frome, The Holocaust odyssey of Daniel Bennahmias, Sonderkommando, University of Alabama Press, 1993: The "four partners" organized for survival. So-and-so got this, so-and-so did that, so-and-so did the other. Mostly they got food.And then they shared. Leon Cohen and Saul Hazan were incredible at this; simply the best, but the thought of Leon evokes a fond chuckle at the welling of memory. "He was so good at stealing!".
Liens externes
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