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Tania Metzel

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Tania Metzel
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Biographie
Naissance
Décès
Voir et modifier les données sur Wikidata (à 74 ans)
VincennesVoir et modifier les données sur Wikidata
Nom de naissance
Tatiana MetzlVoir et modifier les données sur Wikidata
Nationalité
Activités

Tania Metzel, née le à Berlin et morte à Vincennes le , est une pasteure protestante, aumônière des prisons et résistante française.

Troisième pasteure française, elle est aussi connue pour s'être opposée à la guerre d'Algérie et à l'usage de la torture par l'armée française pendant celle-ci.

Jeunesse et Seconde Guerre mondiale

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Tatiana Metzl naît le [1] à Berlin[2] dans une famille de réfugiés russes qui émigre ensuite à Paris[2]. Son père est polonais et leur nom de famille d'origine est Metzl[1]. Sa mère, Olga Poliakoff-Rabinovitch[3] est protestante d'origine juive et elle a une petite sœur, née d'un remariage, qui s'appelle Véronique Rabinovitch[4]. Tania Metzel participe aux Éclaireuses et Éclaireurs unionistes de France organisés par Pierre Maury pendant sa jeunesse[2],[4].

Pendant la Seconde Guerre mondiale, en 1942-1943, la famille craint les persécutions antisémites et l'Holocauste[4]. Elle se réfugie donc au Noirvault, une cache qui dissimule des Juifs dans les Deux-Sèvres[5] avec l'aide d'André et Georgette Hammel[3]. Pendant cette période, elle s'occupe de chercher la nourriture pour le groupe[6]. Cependant, alors que la Gestapo intensifie sa surveillance de la zone, elle se fait contrôler ses papiers, qui sont illégaux, et si elle n'est pas arrêtée, elle et sa sœur quittent la cache pour se rendre à Moncoutant, puis retournent à Paris avec l'aide d'Élisabeth Meyer[4]. Cela est fait pour éviter de compromettre le reste des personnes cachées[4]. En arrivant à Paris, Rabinovitch et Metzel apprennent de leur père que la Gestapo est passée chez le pasteur parisien pour les « chercher »[4].

Elle rejoint la résistance avec le pasteur Georges Casalis[2]. Pendant la Libération et la fin de la guerre, elle rejoint la Cimade et aide les personnes dans le besoin[2].

Aumônerie et guerre d'Algérie

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En 1947, Metzel s'engage comme travailleuse sociale à Haguenau, en Alsace, dont l'hôpital militaire et bourgeois de Haguenau accueille alors la prison destinée aux femmes condamnées à de longues peines[2]. Elle en est la première aumônière[7] et est naturalisée française le [1].

Entre 1948 et 1952, elle effectue une licence de théologie en Suisse[2].

A son retour[2], en 1953, avant même d'être pasteure, elle devient aumônière générale des prisons[8], ce qui témoigne du fait que les communautés protestantes françaises de la période commencent à féminiser leurs institutions en utilisant les femmes dans des rôles marqués comme étant « féminins », comme l'aide aux malades et aux prisonniers[8]. Elle a alors à sa charge deux prisons, dont la partie féminine de la prison de Fresnes[2].

Elle entame trois visites en Algérie française pendant la guerre d'Algérie, en 1957, 1958 et 1962[2],[9]. Sa première visite est motivée par l'appel que lui fait le conseil synodal protestant d'Alger, qui est dépassé par la situation à la prison d'El-Harrach, où de nombreux prisonniers musulmans demandent à suivre le culte protestant[2]. Elle ne connaît rien à la situation du pays quand elle y arrive, mais elle en vient rapidement à considérer que l'indépendance est inévitable[2]. Metzel doit demander un permis pour visiter les prisons algériennes et l'obtient de la part de Paul Teitgen[2]. Sa première visite du camp-prison est compliquée, elle utilise un traducteur français en arabe qu'elle identifie immédiatement comme un homme « aux penchants de droite », certains prisonniers ne veulent pas lui parler car elle est une femme, d'autres lui disent qu'ils n'ont pas le droit aux visites ou qu'on leur a volé leurs biens[2].

De retour en France, lorsque le pasteur Étienne Mathiot est arrêté pour avoir hébergé un cadre du FLN chez lui, elle se rend aussitôt pour le voir en prison[10]. Elle emprunte du vin et du pain chez son épouse, où elle réside avant de lui rendre visite, puis le rejoint en prison et lui demande de partager la communion avec lui[10]. Mathiot lui demande de lui pardonner pour l'action qui a valu son arrestation et hésite à ce propos mais elle lui répond : « Je suis ici, Étienne, est-ce que ce n'est pas une assurance suffisante ? »[10].

En 1958, de retour en Algérie pour une visite de quatre mois, elle se rend dans plusieurs camps d'internement[10]. Tania Metzel n'est pas très impressionnée par les autorités françaises et militaires de la zone, et entre en conflit avec plusieurs gouverneurs militaires, notamment sur la question de la torture[10]. Elle est choquée par certaines pratiques des autorités françaises[11]. Aidée d'un autre interprète, elle parvient à entrer dans plusieurs camps et aider un peu les prisonniers qui s'y trouvent, bien que la situation soit particulièrement abismale, avec l'usage de la torture et la bataille d'Alger qui vient de s'achever[10]. Lors de ces visites, elle est aussi accompagnée de Jacqueline Peyron, qui l'aide[12].

Ses visites en Algérie sont vues comme de bons exemples de la résistance chrétienne à la guerre d'Algérie[13],[14]. En 1961, Metzel aide les étudiants portugais qui fuient Salazar et rejoignent la France, en les attendant et les accueillant à Hendaye[15].

Dernières années et mort

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En 1966[8], elle est la troisième pasteure française[16], après son amie et collègue[17] Élisabeth Schmidt[10].

Elle meurt le 13 août 1997[18] à Vincennes.

Références

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  1. a b et c Journal officiel de la République française, (lire en ligne)
  2. a b c d e f g h i j k l m et n Geoffrey Adams, The call of conscience: French Protestant responses to the Algerian War, 1954 - 1962, Wilfrid Laurier Univ. Press, coll. « Editions in the study of religion », (ISBN 978-0-88920-299-3), p. 90-91
  3. a et b (en-US) « Nimes Agencies - Committee to Douvaine », sur Rescue in the Holocaust (consulté le )
  4. a b c d e et f Jean-Marie Pouplain, Les enfants cachés de la Résistance, Geste, coll. « Témoignages », (ISBN 978-2-910919-59-7), p. 73-115
  5. CRRL, « Centre Régional Résistance & Liberté - Ressources documentaires > Fiches thématiques > Résistance > Résistance Intérieure : La cache des Juifs en Deux-Sèvres, l'exemple du Noirvault », sur www.crrl.fr, (consulté le )
  6. (en) Marianne Ruel Robins, « Unproblematic Altruists? », French Historical Studies, vol. 42, no 4,‎ , p. 681–713 (ISSN 0016-1071 et 1527-5493, DOI 10.1215/00161071-7689232, lire en ligne, consulté le )
  7. Paris-presse, L’Intransigeant, (lire en ligne)
  8. a b et c Jean-Paul Willaime, « L'Accès des femmes au pastorat et la sécularisation du rôle du clerc dans le protestantisme / Women Pastors and the Secularization of the Role of the Protestant Clergy », Archives de Sciences Sociales des Religions, vol. 95, no 1,‎ , p. 29–45 (DOI 10.3406/assr.1996.1035, lire en ligne, consulté le )
  9. Bernard Roussel, « Pasteur en Algérie (1960-1962), puis historien », Les Cahiers d’EMAM. Études sur le Monde Arabe et la Méditerranée, no 23,‎ , p. 19–44 (ISSN 1969-248X, DOI 10.4000/emam.683, lire en ligne, consulté le )
  10. a b c d e f et g Geoffrey Canadian Corporation for Studies in Religion, The call of conscience: French Protestant responses to the Algerian War, 1954-1962, Published for the Canadian Corporation for Studies in Religion = Corporation canadienne des sciences religieuses by Wilfrid Laurier University Press, coll. « Editions SR », (ISBN 978-0-88920-299-3), p. 113-135
  11. Sylvie Thénault, « Les papiers de Baya Hocine. Une source pour l’histoire des prisons algériennes pendant la guerre d’indépendance (1954-1962) », L’Année du Maghreb, no 20,‎ , p. 107–122 (ISSN 1952-8108, DOI 10.4000/anneemaghreb.4643, lire en ligne, consulté le )
  12. (en) Darcie Fontaine, « The Politics of Neutrality: Cimade, Humanitarianism, and State Power in Modern France », Humanity: An International Journal of Human Rights, Humanitarianism, and Development, vol. 9, no 2,‎ , p. 245–270 (ISSN 2151-4372, DOI 10.1353/hum.2018.0013, lire en ligne, consulté le )
  13. (en) Darcie Fontaine, « TREASON OR CHARITY? CHRISTIAN MISSIONS ON TRIAL AND THE DECOLONIZATION OF ALGERIA », International Journal of Middle East Studies, vol. 44, no 4,‎ , p. 733–753 (ISSN 0020-7438 et 1471-6380, DOI 10.1017/S0020743812000840, lire en ligne, consulté le )
  14. « Conscience chrétienne et torture en Algérie », Le Monde,‎ (lire en ligne, consulté le )
  15. Fernando Rosas, Cláudia Castelo, Tomás Medeiros et Alfredo Margarido, « Mensagem », Mensagem - Casa dos Estdantes do Império 1944-1994, Número Especial, vol. 1, no 2.ª,‎ (lire en ligne, consulté le )
  16. « Mlle TANIA METZEL DEVIENT LA TROISIÈME FEMME-PASTEUR DE L'ÉGLISE RÉFORMÉE DE FRANCE », Le Monde,‎ (lire en ligne, consulté le )
  17. Élisabeth Schmidt, « 4 - Le temps des barricades », Documents,‎ , p. 125–158 (lire en ligne, consulté le )
  18. http://www.archivesnationales.culture.gouv.fr/chan/chan/AP-pdf/107-AS-585-956.pdf

Articles connexes

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Liens externes

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