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Page:Colette - La Naissance du jour, 1928.djvu/26

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licates, assiettes jaunes chantant comme cloches sous le doigt plié, plats blancs épaissis d’une crème d’émail, nous retrouvons ensemble, étonnés, un pays qui est le nôtre. Qui me montrerait, sur le Mourillon, à soixante kilomètres d’ici, la maison de mon père et de mes grands-parents ? D’autres pays m’ont bercée, c’est vrai, — certains d’une main dure. Une femme se réclame d’autant de pays natals qu’elle a eu d’amours heureux. Elle naît aussi sous chaque ciel où elle guérit la douleur d’aimer. À ce compte, ce rivage bleu de sel, pavoisé de tomates et de poivrons, est deux fois mien. Quelle richesse, et que de temps passé à l’ignorer ! L’air est léger, le soleil ride et confit sur le cep la grappe tôt mûrie, l’ail a grand goût. Majestueux dénûment qu’impose parfois au sol la soif, paresse élégante qu’enseigne un peuple sobre, ô mes biens tardifs… Ne nous plaignons pas. C’est ma maturité qui vous était due. Ma jeunesse encore anguleuse eût saigné d’accoster

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